samedi 4 mars 2017

Matthias Schoenaerts en héros romantique: Loin de la foule déchaînée.



Ces derniers temps le net abonde en "Matthias-mania" et en " Schoenaerts- craze". Chaque jour vous trouverez sur YouTube une douzaine d'interviews en hollandais, anglais ou francais où, de New York à Cannes, de talk-show en plateaux de tournage il analyse ses rôles ou raconte sa vie et où des stars Oscarisees ( ou presque) telles Kate Winslet,Marion Cotillard ou Carey Mulligan disent leur bonheur d'avoir tourné avec lui. Schoenaerts est, de toute évidence, devenu une étoile montante dans le firmament du cinéma mondiale. Et ceux d'entre- vous qui ont pu voir " Loin de la foule déchaînée",sorti sur les écrans en 2015, se diront que le jeune acteur belge ( flamand) le mérite bien. C'est avec ce film que Matthias Schoenaerts, qui s'est fait connaître dans Bullhead, De rouille et d'os, ou Maryland, tous empreints d'action et de langage violents,démontre, en passant dans un tout autre registre, l'étendue et la  richesse de ses capacités d'acteur.

" Loin de la foule déchaînée" ( Far from the Madding Crowd) est le titre d'un petit bijou de la littérature anglaise du 19- eme siècle, écrit par Thomas Hardy en 1874. C'est l'exemple classique de ce qu'on a appelé un roman pastoral ( certains disent même " une romance pastorale" : l'amour entre un berger et une bergère dans une campagne paisible et idyllique...).Cependant, même si l'histoire de Bathsheba Everdene et ses trois amoureux se situe dans le paysage merveilleusement calme et champêtre de ce que Hardy a appelé le Wessex, une région qui sert de cadre à plusieurs de ses romans, ( en réalité le Dorset dans le sud- ouest de l'Angletrre), certains aspects de "Loin  de la foule déchaînee" ne sont ni archaïques , ni paisibles, ni angéliques mais sont, au contraire, d'une étonnante modernité voire d'actualité. Ce qui fait la popularité de ce roman encore 140 ans après sa publication. Et qui a motivé les scénaristes et les réalisateurs du 20eme  siècle ( la version 1967 de John Schlesinger) et du 21-eme siècle ( notre version de 2015 réalisé par  le Danois Thomas Vinterberg) d'en faire deux très belles adaptations cinématographiques.

Les trois versions , le roman, le film de 1967 et la version 2015, toutes dignes d'intérêt, différent sur plusieurs points, le plus important étant la caractérisation et,surtout ,l'importance accordée à un des personnages,  Gabriel Oak, le berger devenu régisseur d'un domaine agricole. Le rôle que joue Matthias Schoenaerts.

Bathsheba Everdene, fermière qui hérite un grand domaine agricole est aimée , courtisée et demandée en mariage par trois hommes. Le fidèle, honnête, presqu'angélique Gabriel, le beau sergent Troy, conquérant , aventurier et théâtral, et  finalement le Gentleman Farmer  Bolwood ,  qui par son amour obsessionnel pour Bathsheba perd la raison et commet un crime. Dans la version 1967, Bathsheba Everdene est interprétée par la belle Julie Christie, Gabriel Oak par Alan Bates, Sergeant Troy par l'icône des Sixties, Terence Stamp et Bolwood par Peter Finch. Cette première adaptation très fidèle du roman, très belle, (égale en beauté à la version 2015) est peu connue par la jeune generation, qui a souvent oublié les acteurs, stars célèbres à l'epoque. Mais même si les jeunes visionnent cette ancienne.version  et admirent certains de ses aspects , notamment le jeu superbe de Terrence Stamp qui n'a pas vieilli d'un iota, ils seront déçus par le personnage joué par Alan Bâtes: Gabriel Oak, , une des grandes figures de la littérature romantique....Dieu sait si Sir Alan Bates était un bon acteur ( Zorba le grec!!Georgie Girl! An Englishman Abroad, et combien d’autres rôles merveilleusement joués!) mais son Gabriel Oak est aujourd'hui complètement dépassé. Plus du tout conforme à ce que les nouvelles générations considèrent comme héros romantique . Bref,dans ce rôle, Alan Bates n'est pas Sexy. Son personnage est totalement inapte de  " dompter" une femme indépendante et forte  comme Bathsheba Everdene.( a titre de comparaison, voir sur YouTube «  Bathsheba and Troy at
Maiden Cast », une scène de conquête amoureuse a l’aide d’un sabre, l’amour étant assimilé à une attaque de la cavalerie...Voir aussi le jeux superbe de Terence Stamp dans la scène «  OneMorning in May « , également sur YouTube.Ce sont dès veritable morceaux d’anthologie cinématographique!)

C'´est à ce défaut de l'ancienne version que le scénariste  David Nicholls a brillamment remédié en
2015, en taillant un rôle sur mesure pour Matthia Scoenarerts et en faisant de Gabriel Oak la figure masculine centrale du récit. Le Gabriel de Schoenaerts est amoureux, mais il n'est pas servile. Il est honnête, fidèle, droit, intelligent ,sensible. A la fois pudique et fier. Son personnage est éminemment attachant. Bathsheba ( Carey Mulligan, superbe!) lui fait mal mais n'arrive jamais à le  manipuler ou le soumettre.  Si dans la version  1967 Gabriel ou le Gentleman Farmer Bolwood n'arrivent jamais totalement éclipser la figure de l'aventurier Sergeant Troy, dans la version de 2015 Gabriel est celui avec qui Bathseba a la relation la plus proche, la plus naturelle, la plus organique, et dans ce sens , la plus crédible.Et aussi la plus adaptée à notre modernité. Si Bathsheba fait mine de ne pas l'aimer ( tout en prenant son amour à lui pour une chose totalement acquise,permanente et éternelle ) , c'est vers lui qu'elle court à chaque difficulté. Et c'est seulement quand il est vraiment prêt à la quitter,qu'elle se rend compte que l'amour de Gabriel constituait  la chose la plus importante de sa vie: son armature, son refuge. D'où la très belle fin, en apothéose, qui, de manière compréhensible,  va enrager la critique féministe!

Rendre une telle relation et , surtout, une telle fin totalement crédibles face à une figure emblématique  de la littérature victorienne comme Bathseba  Everdene (et surtout face à une interprétation brillante et subtile comme celle de Carey Mulligan !)  est tout le mérite de Matthias Schoenaerts. Avec des gestes mesurés , peu de mots et son visage, ses yeux toujours  si expressifs ,il colle complètement  au rôle.Son jeu  est plein de force et de dignité tranquille, très viril, mais sans une trace de la violence qui caractérise certains de ses rôles précédents . Bref, il y a dans ce film tout pour rendre Schoenaerts encore plus populaire. Et lui ouvrir d'horizons de plus en plus larges.

Espérons qu'il saura éviter les pièges de la jungle hollywoodienne!!


Elisheva Guggenheim -Mohosh


Prochain article: Ces européens que Hollywood  nous envie!

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