mardi 25 décembre 2012

La Guerre de Vietnam: l'Offensive du Têt, prélude à un gâchis.Deuxième partie.


(voir notre article du 24 décembre 2012)

 L’Offensive du Têt  ( du 31 janvier au 26 février 1968), dont la couverture journalistique intensive a fait entrer la Guerre du Vietnam dans toutes les maisons américaines, est considérée aujourd’hui comme un des pires échecs des services de renseignements américains depuis l’attaque japonaise sur Pearl  Harbor en 1941.L’incapacité de prévoir une attaque communiste si audacieuse, si bien préparée et coordonnée contre toutes les grandes et moyennes agglomérations urbaines su Sud Vietnam a mis en évidence le fait que toute la perception américaine de la guerre était viciée dès le début, dés le fameux « Incident de la Baie de Tonkin". En fait, dès 1964.

 La bataille de Khesanh et l’Offensive du Têt  - toutes deux des victoires américaines sur le terrain, avaient toutes les deux le goût très  amer d’un échec. Ceux qui dirigeaient les combats dans les jungles et les riziers d’Asie depuis leurs bureaux à Washington ou, tout au plus, cloîtrés à l’Ambassade américaine à Saigon, se sont enfin rendus compte du fait que cette guerre n’avait pas d'objectifs bien définis, qu’ils ne connaissaient pas vraiment leurs alliés sud-vietnamiens et, surtout, surtout, qu' ils ont totalement sous- estimé leurs ennemis: aussi bien le Vietcong (le maquis communiste sud-vietnamien) que les spartiates du Sud-Est asiatique, à savoir l’Armée nord-vietnamienne régulière! (la fameuse NVA : North Vietnamese Army, toute à fait présente dans le Sud ! Alors que Washington a lié les mains des généraux américains en interdisant aux soldats américains de poursuivre l’ennemi au-delà du 17° parallèle ! Bombarder le Nord jour et nuit : oui. Permettre une offensive terrestre : non.)

 L’entourage du président Johnson est confronté en ce début de 1968 aux vraies questions. Quelles sont les limites d’une « guerre limitée » ? Comment combattre un ennemi dont le but déclarée est « la victoire finale », avec tout ce que cela comporte  d’illimité dans le temps et en termes de sacrifice ?

 De son incapacité de répondre à ces questions, le président Johnson tire les conséquences qui s’imposent : il ne se présentera pas aux prochaines élections. Il part .Cinq ans et près d’un million de victimes plus tard l’Amérique arrivera à la même conclusion .Et durant cinq ans encore la guerre se poursuit dans la confusion totale des lignes de front intraçables, de progrès non démontrables, de positions chèrement acquises et sans explication abandonnées, comme le fut la base américaine de Khesanh…

 Khesanh, en tant que modèle réduit du gâchis vietnamien, revient souvent dans le récit amer des vétérans : ces trois millions et demi d’hommes et femmes américains, qui reviennent au pays traumatisés, souvent mutilés (au sens propre et figuré) comme aucune génération d’américains avant eux .L’âge moyen du soldat américain au Vietnam est 19 ans .Il est donc de sept ans plus jeune que ne l’était son père, combattant de la Deuxième Guerre mondiale.

 Le soldat américain au Vietnam est ce que Gustav Hasford, (auteur du roman qui servira de base  au scénario de Full Metal Jacket) , appellera plus tard un « short-timer ». Un soldat qui fait un « tour de service » au Vietnam d’exactement 395 jours (s’il n’est pas mort ou mutilé avant…).Sa démobilisation interviendra non pas en fonction d’une mission accomplie ou d’un objectif atteint, mais simplement grâce au fait qu’il a survécu , sans blessure grave, 394 jours…C’est une solution qui est vraiment catastrophique et pour le psychisme du soldat et pour ce qu’on appelle, en termes militaires, « l’esprit de corps ». Le G.I est tiraillé entre le soulagement de partir et la culpabilité d’abandonner ses camarades en plein combat. A mesure que le jour fatidique approche il est de plus en plus angoissé : y arrivera-t-il vivant ?

 Fin de la deuxième partie. La suite demain.

 Je vous propose de lire le magnifique « Dispatches » de Michael Herr,( paru en anglais chez Alfred Knopf, en 1977) un véritable chef-d’oeuvre, paru en français chez Stock, et intitulé, je ne sais  pourquoi « Putain de mort ». Egalement les très bons «  Long Time Passing. Vietnam and the Haunted Generation » de Myra McPherson, (Signet, New American Library, 1984) et"Dear America,, Letters Home from Vietnam” (Pocket  Books, 1985).

 Ce récit est tiré de mes articles au Journal de Genève et de mes emissions à la Radio Suisse Romande, Espace2.

Elisheva Guggenheim-Mohosh

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