(voir nos articles du 15 et 16 janvier)
Dans nos deux précédents articles nous avons vu les raisons
historiques et culturelles, voire géographiques (localisation des champs de bataille)
de la formation des stéréotypes négatifs( et très blessants !) de
l’adversaire japonais dans les films de guerre américains entre 1941 et 1945.
Aujourd’hui j’aimerais vous donner quelques exemples
terrifiants des discours tenus dans certains de ces films. Discours qui, aujourd’hui,
67 ans après les bombes atomiques larguées sur Hiroshima et Nagasaki, nous
donnent encore froid dans le dos.
Nous avons déjà parlé d’Airforce, (1943) le chef d’œuvre de
Howard Hawks, dans lequel on entend le pilote américain qui vient d’abattre un
avion japonais et voit le pilote ennemi brûler vif , s’écrier : « Et
un japonais rôti, un ! » (« One fried jap down… ») Encore
plus choquant est l’échange entre deux soldats américains dans
« Guadalcanal Diary » de Lewis Seiler (1943).Un des soldats interroge
son camarade : que ressent-on en tirant sur des êtres humains ? La
réponse : « Oh, tu sais, le choix est simple. Tuer ou être tué, et,
de toute façon, les japs ne sont pas des êtres humains »… (« besides, it ain’t people… »).
« The Purple
Heart » (Dans les griffes de Satan) de Lewis Milestone (1944) raconte le
calvaire de deux équipages de bombardiers capturés, jugés et exécutés par les
japonais. Le discours final de l’aviateur américain joué par Dana Andrews
constitue un des grands moments de la propagande de guerre américaine. Il
préfigure – inconsciemment, peut-être –Hiroshima et Nagasaki, mais aussi les
terribles bombardements stratégiques conventionnels sur les villes japonaises
en 1945. Dana Andrews crie à la face de
ses juges « Il est vrai que nous autres américains ne savons pas
grand-chose sur vous, Japonais, mais vous, vous ne savez rien sur nous. Vous
pouvez nous tuer tous, mais si vous pensez
que ceci dissuadera l’Amérique de vous envoyer d’autres bombes,
vous-vous trompez, oh, et comment ! Nous noircirons vous cieux et nous
brûlerons vos villes, nous les réduirons en cendres et NOUS VOUS METTRONS A
GENOUX ET VOUS ALLEZ NOUS SUPPLIER D’ARRETER ! C’est votre guerre !
Vous l’avez commencé ! Vous l’avez voulu ! Et elle ne se terminera
pas avant que votre sale petit empire ne soit effacé de la surface de la
terre ! »
Ce discours terrifiant, dans un film sorti en 1944 annonce déjà la volonté américaine d’obtenir
une capitulation japonaise sans conditions, une CAPITULATION A GENOUX !
Quant au discours suivant, tiré d’un des plus grands
classiques du cinéma de guerre, « Aventures en Birmanie » (Objective,
Burma !) de Raoul Walsh, sorti en 1945, c’est un monument de haine et de
colère tout à fait caractéristique de l’état d’esprit américain à la fin de la
guerre.
Le film a toujours été objet de scandale, parce que la star,
Errol Flynn, n’a jamais fait son service militaire et que le scénario
présentait les Américains comme les conquérants de la Birmanie, alors que ce
rôle revenait aux Britanniques, nullement mentionnés dans le film..(le film fut
longtemps interdit de projection en Angleterre.) Une des scènes mémorables du
film est le discours halluciné du vieux correspondant de guerre devant les corps des soldats
américains mutilés : « En trente ans de journalisme je croyais avoir
tout vu, je pensais que je savais tout de ce que les hommes pouvaient faire les
uns aux autres. Mais ceci est différent… Cette chose a été commise par des gens
qui se prétendent civilisés…Civilisés ! Ce ne sont que des idiots
dégénérés, des êtres dénués de sens
moral. PETITS SAUVAGES PUANTS ! EFFACEZ-LES, je vous le dis !
Effacez-les de la surface de la terre ! EFFACEZ-LES DE LA SURFACE DE LA
TERRE !! »
Voici donc pour les grands films de guerre. Cependant, le
discours le plus extraordinaire se trouve dans un petit film de propagande,
« Face au soleil levant » (Behind the Rising Sun ) du
réalisateur Edward Dmytryk, sorti en 1943. Pourtant, ce film est connu être le
seul de l’époque , dans lequel les les personnages japonais sont vus de manière
humaine et différenciée, puisque certains, sympathiques et courageux, résistent
au militarisme fasciste de leur pays .Un de ces personnages sympathiques se
suicide à la fin du film. Mais avant le hara-kiri traditionnel, il lance un
appel désespéré : « DETRUISEZ-NOUS, comme nous avons détruit les
autres ! DETRUISEZ-NOUS AVANT QU’ILS NE SOIT TROP TARD ! »
Sans commentaire.
Fin de la série de trois articles consacrés aux stéréotypes
antijaponais d’avant Hiroshima, articles extraits de mes émissions à RSR
Espace2 et mes articles au Journal de Genève. Voir aussi les quatre articles de
la série « Pearl Harbor, d’Oahu à Okinawa », publiés fin décembre
2012.
Elisheva Guggenheim-Mohosh
terrifiant!
RépondreSupprimerpourtant, Aventures en Birmanie est un très bon film!!
RépondreSupprimerun film magnifique (la scène du parachutage)
Supprimerla scène du parachutage est magnifique
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