Chers amis, vous trouverez la première partie de cette série placée en fin de série,
APRES la sixième partie!Mille excuses.
Je vous recommande la lecture de ces articles consacrés au conflit qui a devasté la péninsule coréenne entre 1950 et 1953, pour essayer de mettre les relations actuelles entre les deux Corées dans une perspective historique, celle de la Guerre froide. La Guerre de Corée fut la première " Guerre Onusienne" ! Par moments elle a failli dégénérer en une Troisième Guerre Mondiale. Elle servait aussi d'arrière plan à la fameuse confrontation ( psychodrame?) entre le Président des États Unis , Harry Truman et son bouillant général, Commandant des Forces Onusiennes, Douglas MacArthur!
Vos questions et vos commentaires sont les bienvenus!
D'autre part je vous invite de visiter mon autre blog: Les commérages historiques
d'Elisheva Guggenheim,.commerageshistoriques.blogspot.com
Des articles, essentiellement consacrés aux dynasties Tudor et Stuart.
Elisheva Guggenheim-Mohosh
samedi 21 juin 2014
La guerre de Corée, deuxième partie: une simple opération de police?
Au début de l’année 1950, la philosophie politico-militaire
des Etats-Unis a été résumée dans un document qui est resté dans l’Histoire
comme « NSC-68 ».Le ton de ce document est très pessimiste, à la fois
en ce qui concerne les intentions du bloc soviétique et la capacité de se
défendre « du monde
libre »…NSC-68 donne une image irrémédiablement nocive et destructive du
communisme, l’image d’une agressivité sans fin , une agressivité à laquelle les
Etats- Unis ne sont pas en mesure de
répondre.NSC-68 recommande 50 milliards de $ pour remédier à cette faiblesse.
En effet, en 1950, les Etats –Unis sont très affaiblis sur
le plan militaire. Le nombre des soldats est plus petit qu’il n’était au moment
de l’attaque surprises sur Pearl Harbor. La frénésie de démobilisation à la fin
de la guerre a touché tous les secteurs. L’armement est vieilli, les programmes
d’entraînement retardés, les unités sous-équipées, le budget réduit .On est
encore très loin des 50 milliards prévus
par NSC-68…
C’est dans ce contexte qu’à l’aube du 25 juin 1950 les
canons Nord-Coréens commencent à cracher le feu. Le barrage d’artillerie est
dévastateur et l’armée Nord –Coréenne balaie en quelques heures les faibles forces
du régime de Syngman Rhee. Les forces de Kim Il Sung passent le 38° parallèle et entrent en Corée
du Sud.
Les jours qui vont suivre pèseront lourd dans l’Histoire. Le
25 juin, le Conseil de Sécurité des
Nations Unis, en l’absence du délégué russe Yakov Malik, qui
boycotte la séance, condamnent l’agression Nord-Coréenne. Le 27 juin, le
général Douglas MacArthur, commandant des forces américaines au Japon, reçoit
l’ordre de soutenir les forces Sud-Coréennes avec des forces aériennes et
navales. Les citoyens américains sont évacués de Corée et la 7-ème Flotte
croise au large de Formose. Cette dernière mesure vise autant de prévénir une
attaque communiste contre la Chine que d’empêcher Chang Kai Chek de débarquer
sur le continent chinois et de recommencer sa guerre contre Mao Tse Tung….Ce
n’est vraiment pas le moment…
Le même jour, le 27 juin 1950 , le Conseil de Sécurité
prendra une résolution historique, toujours en absence du délégué russe (qui ne
sera, donc, pas en mesure d’y opposer son véto !!). Cette résolution appelle
tous les membres des Nations Unies à repousser l’agression Nord Coréenne et de
rétablir, par TOUS LES MOYENS à leur disposition la paix dans la péninsule
coréenne.
Le 28 juin les troupes Nord-Coréennes pénètrent dans Séoul
et le 30 juin le Président Harry Truman autorise donc, sans consultation
préalable du Congrès (mais avec son approbation ultérieure) l’intervention des
forces terrestres américaines sur le sol
coréen.
Lorsque la crise coréenne éclate les deux composantes de la
personnalité de Truman entrent en conflit : d’un côté la détermination, de
l’autre côté la prudence. D’une part Truman tremble à l’idée que la Corée ne soit qu’une diversion et qu’un
conflit avec les communistes puisse éclater ailleurs, en Asie ou en Europe, en ce
moment si inopportun pour l’Amérique affaiblie sur le plan militaire. Son premier
souci est, donc, de prévenir une conflagration mondiale à propos de la Corée. A
la question des journalistes « Monsieur le Préddent, sommes-nous en
Guerre ? » Truman répond qu’il s’agit seulement d’une SIMPLE
OPERATION DE POLICE destinée à repousser un tas de bandits communistes…
La Guerre de Corée est la première guerre onusienne de
l’Histoire. Le très égocentrique, voire
égomaniaque héros de la Guerre du Pacifique, Douglas MacArthur, qui se comporte au Japon tel un
Shogun, prendra la tête des forces américano-onusiennes qui débarqueront sur le sol coréen dès juillet 1950. Des forces canadiennes, turques, anglaises, néerlandaises, grecques,colombiennes vont se joindre aux troupes américaines stationnées au Japon. Ces soldats haïssent la Corée. Ils haïssent sa chaleur, l’odeur des engrais humains qui couvrent les champs… Les américains n’ont qu’une idée en tête : que cette « Opéraion de Police » finisse vite, qu’on soit de retour au pays à Noël. (Home by Christmas…) Dans leur pires rêves ils n’imaginent l’enfer qui les attend : un enfer de trois ans et le monde au bord d’une troisième guerre mondiale.
égomaniaque héros de la Guerre du Pacifique, Douglas MacArthur, qui se comporte au Japon tel un
Shogun, prendra la tête des forces américano-onusiennes qui débarqueront sur le sol coréen dès juillet 1950. Des forces canadiennes, turques, anglaises, néerlandaises, grecques,colombiennes vont se joindre aux troupes américaines stationnées au Japon. Ces soldats haïssent la Corée. Ils haïssent sa chaleur, l’odeur des engrais humains qui couvrent les champs… Les américains n’ont qu’une idée en tête : que cette « Opéraion de Police » finisse vite, qu’on soit de retour au pays à Noël. (Home by Christmas…) Dans leur pires rêves ils n’imaginent l’enfer qui les attend : un enfer de trois ans et le monde au bord d’une troisième guerre mondiale.
Fin de la deuxième partie. Cette série va comporter 6
articles.Prochain article: Le début de la
mésentente entre le Président Truman et le Général MacArthur!
mésentente entre le Président Truman et le Général MacArthur!
Je vous recommande la lecture du livre de Sir Max
Hastings , « The Korean War », paru chez Pan Books en 1987 ainsi que la consultation du
numéro de mars 2013 de la revue l’Histoire.Je vous reccomande aussi la lecture des mémoires de George F Kennan, "Memoirs, 1925-1950",,parus chez Little et Brown en 1967 ou en paperback chez Bantam 1969: absolument superbe! Un must pour celui qui s'interesse a l'histoire diplomatique américaine!
Elisheva Guggenheim-Mohosh
La guerre de Corée, troisième partie: début de la mésentente Truman-MacArthur!
Et c’est ici que le bât blesse. Il n’y a pas de réelle
identité de vue entre le Président Truman et son commandant en
Extrème-Orient au sujet des objectifs
fondamentaux de l’intervention américano-onusienne en Corée. Le Président
Truman veut contrer l’expansionnisme
russe en
repoussant l’ennemi. Mac Arthur, lui, veut anéantir l’ennemi
.Pour ce faire , il est prêt de porter
la guerre au-delà de la frontière coréenne, sur terre chinoise. Ou russe, s’il
le faut.
N’a-t-il pas défini le 26 août 1950, dans un discours devant
les anciens combattants, la ligne de défense des Etats-Unis comme « une ligne allant de
Vladivostok à Singapour » ? N’a-t-il pas déclaré que « seule la
maîtrise de cette ligne de défense fera de l’Océan Pacifique un Lac
Paisible » (a Peaceful Lake…) ?
Bien sûr, devant le tollé déclenché à Washington MacArthur
se rétracte….D’ailleurs, en bon soldat discipliné, ne se rétracte-t-il pas
toujours ? Il retire donc tout ce qu’il a dit. Chaque mot
prononcé….APRES leur publication par les journaux.
Truman fulmine et rêve. Faute de pouvoir baîlloner son
général encombrant, il rêve de pouvoir le congédier… Un jour….Mais pas
maintenant. Pas après la grande victoire du Port d’Inchon, le 15 septembre
1950.
Pour le moment, il s’agit d’aller au devant de MacArthur chez lui, dans son fief du Pacifique. La rencontre Truman-MacArthur a lieu le
15 octobre 1950, sur l’île de Wake. Curieusement, on parle peu du conflit
coréen, considéré comme étant- plus ou moins- terminé… On parle du plan de la
reconstruction de la Corée en ruines, on parle de l’amélioration du traité de
paix avec le Japon, on parle du Pacifique en général. On parle même dune
possibilité de redéploiement des troupes ayant combattu en Corée : en
Europe, ou ailleurs.
Les craintes du Président Truman à propos d’une éventuelle
intervention chinoise ? MacArthur les balaie d’un geste de la main. C’est
vrai, le premier octobre 1950 le Premier ministre chinois Chu En Lai a convoqué
l’ambassadeur indien et lui a annoncé en termes très clairs que si les forces
Sud-Coréennes et américano-onusiennes traversent le 38° parallèle, la Chine
entrera dans le conflit. Egalement vrai : New Delhi a transmis ce message
à toutes les capitales du monde, Washington en tête. Vrai aussi : les
services de renseignement alliés ont averti MacArthur des concentrations
suspectes de troupes chinoises en Mandchurie. Mais MacArthur ne croit pas à une
intervention chinoise dans le conflit. Ou alors quelques dizaines de milliers
d’hommes, peut-être…
Au moment où le général Douglas MacArthur parle ainsi, près
d’un quart de million de soldats chinois ont déjà traversé la rivière Yalu et
se cachent, disséminés dans les collines Nord-Coréennes. Plus d’un million
d’autres soldats chinois se tiennent près sur la rive chinoise du fleuve.
Fin de la troisième partie.
Elisheva Guggenheim-Mohosh
La guerre de Corée, quatrième partie:L'hiver terrible....
Dans notre précédent article nous avons vu la genèse de la
mésentente entre le Président Truman et son
subordonné têtu et egocentrique, le général Douglas MacArthur. MacArthur
balaie d’un geste de la main les craintes de Truman concernant la possibilité
d’une intervention chinoise dans le conflit coréen. Il estime que si
intervention il y a, elle se limitera à quelques dizaines de milliers de
soldats…
Au moment où
MacArthur parle ainsi (fin 1950) près d’un quart de million de soldats chinois
ont déjà traversé la rivière Yalu (la frontière entre la Corée du Nord et la
Chine), et se cachent,
disséminés, dans les collines et les montagnes Nord-Coréens.
Près d’un million d’autres se tiennent prêts à intervenir, sur la rive chinoise
du fleuve.
A 20 000 kilomètres plus loin, à Washington, le Pentagon se
range à l’avis de MacArthur, en qualifiant les menaces, pourtant très
clairement exprimées, du Premier ministre chinois, Chu En Lai, de « bluff
communiste ».Les troupes américano-onusiennes poursuivent les combats sur tout le territoire Nord-Coréen et
chassent l’ennemi jusqu’à la frontière mandchourienne. L’ordre donné est de
nettoyer toute la péninsule coréenne des agresseurs communistes. Néanmoins,
Washington impose une interdiction formelle de traverser la frontière chinoise,
que ce soit par la voie terrestre ou
aérienne ! Même les vols de reconnaissance au dessus de la rivière Yalu
sont interdites.
Comme les aveugles dans
un tableau de Pieter Breughel, les troupes de l’ONU avancent…Le paysage
est désolé, le pays inhospitalier. L’hiver coréen approche. L’ennemi chinois
qui se cache dans les collines sait tout des mouvements des troupes alliées.
Les alliées ignorent jusqu’à l’existence de l’ennemi chinois…
Début novembre c’est le choc. Des vagues de soldats chinois
déferlent sur une unité américaine
coupée de ses arrières. Même le Pentagon doit se rendre à l’évidence.
MacArthur s’est trompé. On est en face d’une attaque massive. On est en face d’un
ennemi nouveau et d’une guerre nouvelle : une guerre avec la Chine. La
Chine avec ses étendues infinies et ses ressources humaines inépuisables. Et
reconnaître enfin que les « Boys » ne seront pas chez eux pour Noël.
(« Home by Christmas »…) Que cette guerre sera très longue.
Dès le 6 novembre
MacArthur, très alarmé, demande la levée de l’interdiction de
bombarder la rivière Yalu. On lui donne
donc la permission de bombarder les ponts de la rivière Yalu pour interrompre
le flux d’hommes et de matériel provenant de Mandchourie. Mais on lui interdit
strictement d’atteindre des objectifs se trouvant de l’autre côté du fleuve,
sur la rive chinoise, notamment les barrages et les installations hydrauliques.
Malgré cette limitation, le 24 novembre 1950 les forces chinoises déclenchent
une offensive terrible. Les forces des Nations Unies reculent. Les unités de
l’armée Turque protègent leur retraite avec un courage exemplaire et subissent des pertes
considérables.
Côté américain la Première division des Marines est encerclée et doit être évacuée par mer.
Lorsqu’on lui fait remarquer que les Marines reculent, le général Oliver Smith,
dans un accès d’humour noir, s’écrie « RETREAT HELL !... I’m just
attacking in another direction !! » (Comment ça je recule ? Je
ne fais qu’attaquer dans une autre direction…) « Retreat Hell » est
devenu une phrase aussi célèbre que le
le fameux « Nuts !!! » (foutaises..) prononcé par le
général américain McAuliffe en 1944, durant la Bataille des Ardennes, lorsque
les Allemands lui ont demandé de
capituler avec ses forces encerclées à Bastogne.
Fin de la quatrième partie .Prochain article :
Truman-MacArthur, le choc final.
Je vous propose de voir le très bon film de Mark Robson ,
Les Ponts de Toko-Ri, (1954) avec une distribution très brillante :
William Holden, Grace Kelly, Mickey Rooney, Fredric March.
Film basé sur le
roman de James Michener, avec d’images de combat remarquables et une réfléxion
très désabusée et lucide sur cette Guerre de Corée, que déjà ses contemporains
ont surnommée « The Forgotten War » : La guerre oubliée.
Elisheva Guggenheim-Mohosh
La guerre de Corée, cinquième partie: Truman- MacArthur, psychodrame et choc final!
En Corée, comme à Washington, on fête tristement Noël 1950.
Le très aimé général Walton Walker s’est tué dans un stupide accident de jeep
le 23 décembre. Il est remplacé par le général Matthew Ridgway, qui doit tout
de suite faire face à un demi million de soldats chinois qui déferlent sur les
troupes américano-onusiennes. Comme si tous les sacrifices de l’année 1950 ne
servaient à rien, Séoul tombe une nouvelle fois, le 4 janvier 1951. Donc, c’est
le retour à la case départ : celle de juin 1950.
Il est maintenant tout à fait clair que les Etats-Unis se
sont fait piéger en provoquant l’intervention chinoise. Et il est également
clair que ce n’et plus une guerre qu’on pourra gagner sans y investir des
moyens énormes et sans prendre des risques énormes !
De plus, le Président Truman n’est toujours pas libéré de sa
peur initiale : a peur que la Corée ne soit qu’une diversion et qu’une
attaque communiste de grande envergure se prépare ailleurs. Et si c’était le
cas, comment transférer des troupes stationnées en Europe ou en Amérique pour
les besoins de la superoffensive
imaginée par Douglas Mac Arthur ?(voir nos précédents articles.) On
ne peut, en aucun cas, sacrifier la vie de centaines de milliers de soldats
américains pour venir à bout d’une multitude inépuisable de chinois
hostiles ! On ne peut pas, non plus, engager les Nations Unies dans une aventure
sans fin et sans limites! Déjà, certains gouvernements alliés ont froncé les
sourcils lorsque MacArthur a traversé le 38° parallèle. Peu seraient les pays
qui suivraient les Etats-Unis dans une guerre à outrance contre la Chine. La Chine
soutenue par les armes russes…
Tandis que sur le terrain commence une contre-offensive,
menée par Matthew Ridgway, contre-offensive qui repoussera les communistes au
Nord du 38° parallèle, le duel verbal entre Washington (Truman) et Tokyo
(MacArthur) ne fait que s’exacerber. Peut-être le général Douglas MacArthur ne
se rend pas compte combien son comportement est sans précédent. Lui, qui aurait
immédiatement mis devant une Cour Martiale n’importe lequel de ses officiers
qui se serait permis de donner des conférences de presse pour le critiquer, ne
se prive pas de critiquer ouvertement les décisions de son commandant en chef,
à savoir le Président des Etats-Unis !
C’est que MacArthur, un des grands vainqueurs de la guerre à
outrance, la guerre illimitée que fut la Deuxième Guerre mondiale, est
totalement incapable d’imaginer l’usage limité de la force. Cette théorie
nouvelle, « à la mode » à Washington, lui semble une théorie
fumeuse… « La Guerre Limitée »…Mais qu’est-ce que c’est ?!!
L’ennemi est là pour être vaincu, un point, c’est tout ! « IN WAR
THERE IS NO SUBSTITUTE FOR VICTORY ! »-« Dans une guerre il n’y
a pas de solution de rechange à a
victoire ! »-dira-t-il.
Fin mars 1951, alors que la contre-offensive que mène (sans
fanfares !) Matthew Ridgway est en train de réussir, MacArthur sort un chef-d’oeuvre de mépris à l’égard de Washington. IL informe l’ennemi que,
malgré les restrictions extravagantes qu’on LUI a imposées, IL a, LUI, fait
avancer la situation au point où l’ennemi communiste n’a qu’à déposer les
armes. Donc LUI, MacArthur, offre généreusement au commandant en chef des forces ennemies de négocier avec lui,sur le champ de bataille, un accord de
cessez-le-feu. Sinon, SA riposte sera terrible. C’est ce qu’on lui a
enseigné à l’Académie Militaire de West Point ! West Point , où IL a eu l’honneur
d’apprendre le métier de la guerre. Contrairement à d’autres (….), qui n’y sont
pas allés…
A Washington, les spéculations vont bon train : » le
petit politicien du Missouri »
( entendez par la le Presdent des États Unis, Harry S. Truman ) osera-t-il congédier le “Lion des Philippines”, le “Héros de Bataan,”, le “ Vainquer du Pacifique”, le “Pacificateur du Japon”?
( entendez par la le Presdent des États Unis, Harry S. Truman ) osera-t-il congédier le “Lion des Philippines”, le “Héros de Bataan,”, le “ Vainquer du Pacifique”, le “Pacificateur du Japon”?
Il ose.
Le 11 avril, un message est adressé à Douglas MacArthur, à
Tokyo .Le texte est le suivant : « C’est avec un profond regret que
je dois vous informer que vous êtes démis de vos fonctions de commandant en
chef des Forces Alliés en Extrême- Orient .Vous êtes démis de fonctions de commandant en chef des Forces des Nations
Unies en Corée. Le général Matthew Ridgway vous remplacera dans toutes vos
fonctions avec effet immédiat. Je vous
autorise de prendre toutes les dispositions pour votre départ vers un lieu de
votre choix… »
Signé : Harry S. Truman, Président des Etats-Unis.
Fin de la cinquième partie. Prochain (et dernier) article de
la série : « La guerre de Eisenhower!"
Je vous propose de regarder un film, magnifiquement
interprété par Gregory Peck, dans le rôle de Douglas MacArthur :
« MacArthur,le général rebelle » de Joseph Sargent, sorti en 1977.
Elisheva Guggenheim-Mohosh
La guerre de Corée, sixième partie: La guerre de Eisenhower.
L’onde de choc causée par le limogeage de Douglas MacArthur traverse le continent américain, puis l’Océan Pacifique, pour frapper en plein fout le Japon. Les Japonais, leur empereur en tête, sont douloureusement touchés par la décision de Washington. Sentant l’humiliation terrible de son ancien ennemi, l’empereur Hirohito prend une décision sans précédent : il se rend à la résidence de MacArthur et lui dit adieu en l’accompagnant à sa voiture. A l’aéroport de Tokyo une foule d’un million de japonais acclame le général américain en disgrâce.
A son atterrissage à San Francisco, la nuit, une foule en délire l’accueille .Et la scène se répète à chaque escale, jusqu’à Washington puis à New York, où une foule estimée à sept million de personnes l’acclame ! Truman et le Parti démocrate tremblent : serait-il candidat aux élections prochaines ? Et les gagnera-t-il ?
Mais ce sera un autre général couvert de gloire qui gagnera, au nom du Parti Républicain, les élections présidentielles de novembre 1952 : le général Dwight Einsenhower. Le général Douglas MacArthur disparaîtra de l’arène politique avec cette phrase qui restera, elle, dans l’Histoire : « OLD SOLDIERS NEVER DIE. THEY JUST FADE AWAY »(Les vieux soldats ne meurent jamais : ils s’effacent).
Avec le départ de Douglas MacArthur un vent de soulagement souffle dans les chancelleries européennes et dans les couloirs des Nations Unies. Le danger d’une « guerre à outrance », « une guerre totale », « une déflagration mondiale », « un holocauste nucléaire » s’éloigne. Mais la guerre de Corée, une guerre de positions, une guerre d’usure, la guerre pour gagner une colline par-ci, pour « Pork Chop Hill » ou pour « Heartbreak Ridge », des coins de terre sans véritable importance stratégique, chèrement conquis et sans explication abandonnés, va se poursuivre encore deux années. Et ces deux années de combat vont être parmi les plus stupidement, les plus inutilement meurtrières dans l’histoire des guerres modernes.
Les soldats ne comprennent plus le but de leur combat. Leurs commandants ne savent pas quels sont les véritables objectifs de cette guerre. Les troupes américano-onusiennes haïssent la Corée, son climat aux températures extrêmes, l’odeur des champs fertilisés avec des excréments humains…Ils haïssent aussi les Coréens. Ils les appellent « gooks » (bridés). (Tout ceci ne vous « rappelle » rien ? La Guerre du Vietnam, peut-être ?)
L’opinion publique mondiale les oublie .C’est une guerre à la fois meurtrière et oubliée. Tout le monde serait ravi d’en finir, d’oublier le rêve impossible d’une libération de toute la péninsule coréenne de la domination communiste. Tout ce que l’on veut c’est rétablir le status quo ante. Le status quo d’avant le 25 juin 1950…Or, c’est pratiquement chose faite ! Déjà en printemps 1951 Séoul est libérée à nouveau, et, malgré les offensives communistes extrêmement coûteuses en vies humaines et des contre-offensives onusiennes non moins meurtrières, la ligne de front se situera désormais, grosso modo au nord du 38° parallèle.
En avril 1952 le général Eisenhower entre en scène .Quittant le commandement de l’Otan en Europe, il se présente aux élections présidentielles américaines .Le 23 juin 1951, le délégué soviétique à l’ONU, Yakov Malik, propose un cessez le feu. Des négociations débutent en juillet à Kaesong, s’interrompent pour cause de combats, puis reprennent à Panmunjom. Et durant encore 20 mois, tout en négociant, les hommes vont s’entretuer par milliers, par dizaines de milliers, dans une guerre de tranchées qui n’est pas sans rappeler la Première Guerre mondiale.
Eisenhower prononce dans un discours tenu à Detroit, le 24 octobre 1952 la phrase qui pèsera lourd dans l’Histoire : « I SHALL GO TO KOREA ». J’irai personnellement en Corée pour veiller à ce que cette guerre cesse. 2 semaines après avoir prononcé cette phrase Dwight Eisenhower devient Président des Etats-Unis et le 29 novembre il s’envole vers la Corée.Il visite ses troupes, il visite les MASH, il rend visite au Président sud-coréen Syngman Rhee, homme amère et méfiant, qui sent bien que l’Amérique va abandonner son régime corrompu. Il sent bien qu’on envisage une sort de « Coréanisation du conflit »,un transfert des efforts et des sacrifices vers la Corée du Sud ( semblable à la « vietnamisation » du conflit indochinois, 20 ans plus tard !).
Mais parallèlement à cette intention manifeste de finir les combats, la nouvelle administration américaine sait se faire menaçante .Les négociations à Panmunjom buttent sur la question de l’échange des prisonniers de guerre : les chinois insistent sur le retour de tous les prisonniers chinois et nord-coréens, or 50 000 de ces malheureux refusent catégoriquement de retourner vers les zones sous contrôle communiste. Et les négociateurs des forces alliées refusent de les rapatrier contre leur
volonté. Et la guerre continue, avec la menace américaine de bombarder les territoires au-delà de a sacro-sainte frontière chinoise. (Encore et toujours la rivière Yalu…).Etait-on près d’un bombardement nucléaire de la Chine ? Etait-ce un bluff ? Toujours est-il que les négociations à Panmunjom aboutissent le 27 juillet 1953 :Les Etats-Unis et l’URSS reconnaissent l’existence de deux Corées.
Toutes ces destructions, ces millions de morts,(Chinois, Coréens, Américains, Britanniques,
Grecs, Turcs, Colombiens....) pour revenir à la case départ : deux pays-frères séparés
par le 38° parallèle....Et en héritage, une tension permanente, latente ou aiguë , qui peut, en tout moment, dégénérer en conflit ouvert, éventuellement nucléaire ...
Fin de la série consacrée à la Guerre de Corée .(Attention: à cause d'une erreur de manipulation,
la première partie de cette série -"La guerre de Corée: une guerre presqu'oubliée..." va
maintenant suivre)
Elisheva Guggenheim-Mohosh
vendredi 20 juin 2014
La guerre de Corée, première partie: Une guerre presqu'oubliée...
La guerre de Corée : une guerre terriblement meurtrière…une guerre que déjà ses contemporains ont surnommée « The Forgotten War »-la guerre oubliée…Aujourd’hui, alors que le monde regorge de conflits régionaux, plus dangeureux les uns que les autres, et que l’intérêt pour certaines guerres, notamment celles du Proche et Moyen Orient ne cesse de croître, comment se fait-il que la plupart de ceux qui ont moins de quarante ans ne connaissent la guerre qui a devasté la péninsule coréenne entre 1950 et 1953 autrement qu'à travers les joyeuses aventures des médecins et des infirmières de la vieille série américaine M.A.S.H. ?
Tant de gens, tant de peuples ont souffert des retombées de ce conflit…Outre les millions de victimes coréennes, civiles et militaires, des centaines de milliers de chinois, des dizaines de milliers d’américains, de britanniques, d’australiens, mais aussi des canadiens et des français, des belges, des turcs et des éthiopéens, des thailandais et des colombiens y ont perdu la vie… Le monde a échappé de justesse à une guerre nucléaire pour sombrer, durant plus de 30 ans, dans la Guerre Froide…Tant de moments dramatiques ont jalonné les trois années qu’a duré la guerre de Corée, tant de grands personnages historiques en ont été les acteurs directs ou indirects, que l’ignorance et l’oubli nous paraissent incompréhensibles. Incompréhensibles ils le sont aussi pour les historiens, historiens qui voient dans la guerre de Corée un conflit qui préfigure déjà la guerre de Vietnam…Max Hastings, un des meilleurs spécialistes de la question dit, que si l’on avait retenu certaines leçons de la Corée, la guerre de Vietnam n’aurait pas été le désastre que l’on sait .En tout cas, il y a de nombreux points de similitude entre les deux grands conflits de la Guerre Froide, et d'abord le désenchantement des combattants sur le terrain et la réticence des opinions publiques occidentales qui ne fait qu'augmenter avec le temps.
Peu de pays asiatiques sont aussi homogènes sur le plan ethnique et linguistique que la Corée. Peu de peuples tellement unis à l’origine ont été déchirés par lahaine pour une période aussi longue.
La Corée fut toujours au centre d’une lutte d’influence entre ses puissants voisins :la Chine et le Japon. Occupée en 1910 par les japonais, elle subira le joug de l’envahisseur durant 35 ans, jusqu’à la défaite de l ‘Empire du Soleil Levant devant les Alliés. En 1943, en pleine guerre, les représentants des Etats Unis, de la Grande Bretagne et de la Chine se mettent d’accord au Caire sur le principe selon lequel, lors de la victoire des Alliès, la Corée deviendra un pays libre et indépendant. Lors de la Conférence de Yalta, dans le cadre de leur promesse d’attaquer les japonais trois mois après la défaite allemande, les russes acceptent aussi l’idée de l’indépendence coréenne.
Tenant à la lettre sa promesse, somme tout génante, Staline attaque la Mandchourie le 8 août 1945, deux jours après Hiroshima, un jour avant Nagasaki… Par cette intervention tardive, l’URSS entre dans le club des pays vainqueurs de Guerre du Pacifique. Ses représentants sont là, fiers, ensemble avec les délégués des Nations Alliées,au bord de l’USS Missouri, le 2 septembre 1945, lors de la signature de l’acte de capitulatuion du Japon.Une division russe, venant de Mandchourie sera en Corée, en même temps qu’une division de l’armée américaine, pour recevoir la réddition de l’Armée japonaise, pour désarmer les soldats japonais vaincus et pour les repatrier dansleur pays. Pour simplifier la répartition des tâches entre les alliés, russes et américains,on fixe une ligne de démarcation entre leurs secteurs respectifs. Cette ligne passe par le 38-ème parallèle.
Mais ce que les américains considèrent comme une simple ligne de démarcation,devient pour les russes une ligne de partition. L’Armée soviétique impose des limitations de plus en plus sévères au passage de leur secteur vers le secteur américain. Ils coupent même les lignes éléctriques qui passent à travers le 38° parallèle.
La Corée se trouve ainsi divisée de facto en deux entités. Celle du Nord, pro -communiste,
hermétiquement fermée, et celle du Sud, pro-occidentale, sous l’administration des
forces d’occupation américaines.
Les Etats Unis soumettent la question de la réunification des deux Corées aux Nations
Unies. Celles-ci créent une commission spéciale chargée d’organiser des éléctions
générales en 1948.Cette commission n’aura jamais le droit de mettre les pieds en Corée
du Nord. La Corée du Sud se constitue, en août 48, en République de Corée, sous la
direction d’un politicien âgé, aux tendances despotiques marquées, le docteur
Syngman Rhee. Quelques semaines plus tard, la République Populaire Nord Coréenne
est proclamée. A sa tête le très lumineux et très peu démocratique camarade Kim
Il Sung…La rupture entre les deux parties du Pays du Matin Calme est consommée…
Fin de la première partie (la série comprend six articles. Prochain article: "une simple opération de police?")
.
Ces articles sont tirés de mes émissions sur RSR Espace2(Radio-TV Suisse).
.
Je vous recommande de visionner sur You Tube la magnifique série "Histoire de comprendre"
avec la participation très brillante d'Alexandre Adler et la lecture du livre de Max Hastings:
"The Korean War" paru chez Pan Books à Londres, en 1988.Le livre de Hastings
est certainement un des meilleurs ouvrages jamais consacrés à ce conflit.
Elisheva Guggenheim- Mohosh
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